W.V.O.Quine: Die Videoserie (Vorlesung Hrachovec, WS 2012): Unterschied zwischen den Versionen

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Nous sommes réunis ici pour parler de la vertu des maîtres . J’ai écrit un ouvrage qui s’appelle Le Maître ignorant . Il me revient donc logiquement de défendre sur ce sujet la position apparemment la plus déraisonnable : la première vertu du maître est une vertu d’ignorance.

Version vom 11. Oktober 2012, 08:29 Uhr

W.v.O.Quine: Die Videoserie (Vorlesung Hrachovec, WS 2012)

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Elke Brendel: Paradoxien des Wissens

Quine - Ontological Relativism (Teaching Company)

Der unwissende Lehrmeister

Entretien avec Jacques Rancière à propos de l’ouvrage Le Maître ignorant

JR : Jacotot est en 1818 un professeur français émigré aux Pays-Bas. Ses étudiants hollandais veulent apprendre le français, mais lui ne connaît pas le hollandais. Il ne dispose que d'une version bilingue du Télémaque de Fénelon et se résout à leur demander d'apprendre le français en s'aidant de la traduction. Au bout d'un certain temps, il leur demande de raconter en français ce qu'ils pensent de ce qu'ils ont lu. Il s'attend à une catastrophe. Or, il est très surpris par la qualité de leurs travaux et tire de l’expérience deux leçons essentielles. La première est celle de la dissociation entre la volonté du maître et l’exercice de l’intelligence de l’élève. Si ces étudiants hollandais ont compris le fonctionnement des phrases françaises uniquement en lisant des phrases françaises, cela signifie qu'ils n'ont pas eu besoin des explications du maître pour comprendre quelque chose. L’égalité des intelligences veut d’abord dire ceci : il y a une autonomie absolument irréductible du travail d’une intelligence que l’on peut mettre en évidence par cette expérience de hasard qui a séparé complètement l’exercice du maître de l’exercice de l’élève. L’idéologie pédagogique normale est de croire que l’élève apprend ce que le maître lui enseigne. L’expérience de Jacotot permet, elle, de penser que le processus d’apprentissage n’est pas un processus de remplacement de l’ignorance de l’élève par le savoir du maître, mais de développement du savoir de l’élève lui-même. Il y a d’abord un travail autonome de l’intelligence, et ce travail va de savoir à savoir et non d’ignorance à savoir. L’égalité des intelligences qu’il professera à partir de là veut d’abord dire ceci : pour que l’apprentissage soit possible, il faut que l’intelligence employée par l’élève soit la même que celle du maître, la même que celle de Fénelon, du traducteur, du typographe, etc.

La deuxième leçon est que l’on peut partir de n’importe où. La règle pédagogique normale veut que l’on parte du « commencement ». Elle suppose qu’il y a deux sortes d’intelligence : celle des ignorants, qui va au hasard, par rapprochement et chance, et celle du maître et des savants qui procède méthodiquement, du plus simple au plus complexe. Cela suppose l’écart d’un langage à un métalangage : il faut traduire les mots de l’écrivain dans un autre langage pour que l’élève arrive à les maîtriser. A l’inverse, Jacotot pose qu’il n’y a pas de différence entre des types d’intelligences. Tous les actes intellectuels s’opèrent de la même façon. Et n’importe quelle intelligence est capable d’effectuer le trajet à partir d’un point quelconque.

L'expérience de Jacotot vérifie donc deux principes : là où on localise l’ignorance, il y a toujours déjà en fait un savoir, et c’est la même intelligence qui est à l’œuvre dans tous les apprentissages intellectuels. Jacotot entrait ainsi en rupture avec le mouvement général de son temps. Sa découverte de l’ « Émancipation intellectuelle » survient après 1815, au moment où l’on se préoccupe de réordonner la société après le grand choc révolutionnaire. On cherche à promouvoir un progrès ordonné basé sur une hiérarchie des formes d’éducation afin d’organiser une société moderne pacifiée. C’est là la grande idée du moment. Passé l’âge critique, on entre dans l’âge organique. La cohésion de la société moderne impose que les inégalités soient un peu réduites, qu’existe un minimum de communauté entre ceux qui sont au sommet de la hiérarchie et ceux qui sont en bas. C’est l’éducation qui est supposée mettre chacun à sa place tout en assurant un minimum de partage des savoirs et des valeurs. Les gens du peuple doivent avoir quelques bases pour progresser dans leur métier et participer aux valeurs communes de la société. En 1833, la loi Guizot sur l’instruction primaire est le premier jalon de ce processus soutenu par une intense littérature. Dans ce contexte, Jacotot intervient absolument à contre-courant. Selon lui, tout cela n’est qu’une machine d’abrutissement : la loi du progrès et l’éducation progressiste sont précisément le contraire de l’émancipation intellectuelle.

...

JR: Il n’oppose pas le sujet au citoyen, mais une méthode de l’égalité à une méthode de l’inégalité. L’idée de la « réduction des inégalités » commence à s’imposer à son époque. Elle conduit à établir une homologie entre le modèle pédagogique et le modèle social. Or pour Jacotot, l’idée que l’on va élever le peuple par l’éducation implique un processus d’éternisation de l’inégalité. Si l’on pense que l’égalité adviendra comme le résultat des efforts pour réduire les inégalités, les « réducteurs » d’inégalité maintiendront toujours leur privilège sous couvert de le supprimer. Il faut partir de l’égalité de fait qui est nécessaire pour que le rapport inégalitaire lui-même fonctionne : il faut déjà que l’élève comprenne les mots du maître pour que celui-ci puisse lui enseigner. Dans l’intrication des deux relations – égalitaire et inégalitaire – la question est de savoir lequel sert de principe : le rapport de l’ignorant au savant ou celui de deux intelligences qui veulent se comprendre. Si c’est le rapport inégalitaire qui commande au rapport égalitaire, il se reproduira éternellement. L’émancipation implique, elle, de partir de l’idée de la capacité de n’importe qui. Peu importe ce qu’il apprend, l’essentiel est la révélation de cette capacité à elle-même. Le reste dépend de lui. Cette idée s’oppose de front à l’idéologie progressiste.

...

JR : Ce n’est pas une méthode d’enseignement. Il n’a jamais fait de programme d'instruction, même s’il a enseigné plusieurs disciplines. Il n'a jamais voulu se transformer en chef d’institution scolaire. Pour lui, l’important n’est pas d’établir un programme scolaire mais de mettre une intelligence en possession de son propre pouvoir.

On peut partir du Télémaque, d’un texte de prière, etc., mais le principe consiste en une méthode, si méthode il y a, d’exhaustion. On est devant un livre, un texte, comme devant une chose étrangère que l’on peut et doit entièrement s’approprier. D’où la référence à la méthode par laquelle l’enfant s’approprie sa langue maternelle ; en procédant par association de ce qu’il sait à ce qu’il ignore, sans recourir à des explications.

Son idée est orientée vers une fin unique : la révélation d’une capacité intellectuelle. Son enseignement ne vise pas l'apprentissage d’une discipline quelle qu’elle soit. D’où une méthode qui s’arrête sur chaque lettre, chaque mot, chaque phrase, chaque idée. Si on possède bien vingt ou cinquante pages d’un livre quelconque, et si l'on peut en rendre compte avec ses expressions elles-mêmes, on est capable de n’importe quel autre apprentissage. C’est un défi, une provocation, mais aussi quelque chose qu’on vérifie tout le temps. On s’est formé essentiellement à partir des choses que l’on a déchiffrées soi-même, difficilement, laborieusement. La méthode c’est celle de l’aventure. Il faut trouver le chemin. Ce n’est pas la « méthode active », où le maître organise le parcours d’obstacles. Il s’agit de mettre la personne en situation de se servir de sa propre intelligence, non pour arriver au but mais pour se frayer un chemin.


Sur "Le maitre ignorant"

Nous sommes réunis ici pour parler de la vertu des maîtres . J’ai écrit un ouvrage qui s’appelle Le Maître ignorant . Il me revient donc logiquement de défendre sur ce sujet la position apparemment la plus déraisonnable : la première vertu du maître est une vertu d’ignorance.